Séverine Menétrey
Rev. Internationale de droit économique, 2018/4, pp 499-515
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Note de lecture, Faustin Ekollo, docteur en droit
Une intersection entre deux nouveautés relatives (quelques années), cela donnerait en mathématiques une nouveauté au carré. En droit, cela ouvre des perspectives. Lorsque l’exercice comporte en plus un grand potentiel d’application pratique on le signale à la fois aux chercheurs et aux praticiens, y compris ceux de la zone Ohada en dépit de l’intitulé européiste.
D’un point de vue de droit comparé, l’article fait rapidement le point sur la situation aux Etats-Unis, au Royaume-Uni et en Australie sur la question des accords de 3rd Party Litigation Funding (financement du procès par des tiers). Dans une perspective européenne, avec l’exemple de la société belge CDC, l’article examine des subtilités entre 3rd Party Litigation Funding et cession de créance litigieuse. Avec le cas Nexia NL, le mécanisme de crowdfunding impliquant 80.000 personnes peut aussi être source d’inspiration dans la zone Ohada.
Au-delà du domaine de définition retenu par le professeur Menétrey, ce travail de droit comparé fournit des ressources adaptables par les acteurs locaux pour une pratique internationale efficace en matière de procédures coûteuses, même en dehors de l’hypothèse des actions collectives expressément envisagée par l’auteur, comme les questions consuméristes. Les avocats en charge de la défense des intérêts financiers internationaux des Etats africains (et de leurs dépendances), les conseils des entreprises impliquées dans le commerce international et les juristes de la Facilité africaine de soutien juridique (ASLF) doivent lire cet article. Ils auront à l’esprit que les techniques décrites sont connues des fonds-vautours.
Pour ce qui est du commerce international, il faut insister sur ce que le Third Party Funding est désormais admis planétairement, y compris sur des marchés importants pour les praticiens africains du commerce international comme la Chine[1] ou Singapour[2].
Il n’est point besoin de nouveaux textes pour appliquer ces mécanismes dans les pays de l’Afrique Ohada ; divers contrats nommés s’y prêtent, la caractéristique étant l’élément principalement aléatoire et largement indépendant des parties. Pour la validité des conventions, il y a toute liberté de partager risques et profits, pour peu que les proportions léonines ou dérisoires soient clairement bannies. Le complément éventuel d’inspiration pourra se nourrir de sources de droit coutumier international.
En droits internes africains, ces outils peuvent aussi servir à la défense d’intérêts des communautés claniques, par exemple contre l’accaparement des terres par les gouvernements, ou autres projets d’envergure qui ignorent les droits des peuples vivant sur place, compte tenu des coûts qu’implique la défense à long terme de tels intérêts.
Les praticiens Ohada doivent d’autant plus s’aguerrir à ces techniques que leurs clients, de la zone Ohada, en ont particulièrement besoin tant pour les besoins locaux que sur le plan international. Il y a à cet égard, au-delà de l’acquisition des connaissances, la nécessité d’impliquer des financiers locaux, ou d’organiser des communautés, d’initier des synergies qui ne se réaliseront pas du jour au lendemain.
On en profite pour rappeler l’actualité internationale du retrait litigieux impliquant le Congo-Kinshasa[3] dans le rodéo qui l’oppose depuis de nombreuses années à des fonds-vautours[4]. Il s’agit en quelque sorte du mécanisme inverse.
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